Corporate Desk 2018

#176 2005-12-27 00:43:45

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Georges COURTELINE / Philosophie / OEuvres / Robert Laffont - Bouquins 1990

« QUELQUES AVIS QUI, ÉTANT SAGES, SONT FORCÉMENT DE NOMBRE LIMITÉ
Dis ce que tu penses.
Paye ce que tu dois.
Ne vends pas plus cher que ça ne vaut.
Méfie-toi des conseils, mais suis les bons exemples.
Laisse la clé sur le buffet si tu ne veux pas qu'on te vole.
Ne perds jamais de vue que le bon beurre est la base de la bonne cuisine, et souviens-toi que faire le malin est le propre de tout imbécile.
Enfin - uti, non abuti, nous recommande la sagesse antique - , use de tout, mais n'abuse de rien. Bois - sans excès ; fume - sans excès ; aime - sans excès ; et que, toujours, la bonne qualité de l'objet détermine ton choix et le fixe. Mieux vaut boire trop de bon vin qu'un petit peu de mauvais et pratiquer l'amour avec deux belles filles qu'avec une seule vieille femme en ruine. L'agrément y trouve son compte, et l'économie animale plus encore. »

Hors ligne

#177 2005-12-27 00:44:19

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Ambrose BIERCE / Le Dictionnaire du Diable (1911) / Éditions Rivages 1989

« Décalogue n. Ensemble de commandements, au nombre de dix - chiffre suffisant si l'on veut s'en tenir à une stricte observance, mais toutefois légèrement insuffisant si l'on préfère avoir l'embarras du choix. Voici l'édition révisée du Décalogue, strictement ajustée à ce méridien :

Tu n'adoreras pas un autre Dieu que moi :
Cela revient trop cher d'en célébrer plus d'un.

Ne feras ni d'images ni de statues sacrées,
Car les marchands du temple ont l'exclusivité.

N'utiliseras pas en vain le nom de Dieu,
Attends le bon moment où ça fait son effet

Tu ne travailleras pas la journée du Sabbat,
Ce jour est consacré aux matchs de football.

En bon fils garderas chez toi tes vieux parents ;
Ça vient en déduction de ta déclaration.

Jamais tu ne tueras, ni ne seras complice ;
D'ailleurs tu jetteras la facture du boucher.

Tu n'embrasseras pas la femme de ton voisin,
Sauf si la tienne a succombé à ses caresses.

Tu ne voleras pas. Le vol est pernicieux ;
La carambouille dans les affaires est bien plus sûre.

Tu n'apporteras jamais de faux témoignages ;
Fais-toi seulement l'écho des racontars publics.

Enfin tu cesseras de convoiter en vain
Ce que par bec et ongles tu n'as pu obtenir. »

Hors ligne

#178 2005-12-27 00:45:01

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

André GIDE / Journal 1889-1939 / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1951

« Je n'admets pas que rien me nuise ; je veux que tout me serve, au contraire. J'entends tourner tout à profit. »

Hors ligne

#179 2005-12-27 00:45:33

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Jean COCTEAU / Journal d'un inconnu / Grasset 1953

« Je songe au credo de Gide : Je n'admets pas que rien me nuise, je veux que tout me serve, au contraire. J'entends tourner tout à mon profit.
C'est le credo de la visibilité. Pour obtenir le credo de l'invisibilité (le mien), il n'y a qu'à tirer un négatif de ces phrases, et y joindre ces lignes d'Héraclite : Pour Dieu tout est bon et juste. Les hommes, au contraire, conçoivent certaines choses comme justes, d'autres comme injustes. »

Hors ligne

#180 2005-12-27 00:46:04

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

ALAIN / Propos I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1956

« Je parlerais tout à fait autrement aux jeunes lionceaux dès qu'ils commencent à aiguiser leurs griffes sur les manuels de morale, sur les catéchismes, sur toutes coutumes, sur tous barreaux. Je leur dirais : n'ayez peur de rien ; faites ce que vous voulez. N'acceptez aucun esclavage, ni chaîne dorée, ni chaîne fleurie. Seulement, mes amis, soyez rois en vous-mêmes. N'abdiquez pas. Soyez maîtres des désirs et de la colère aussi bien que de la peur. Exercez-vous à rappeler la colère comme un berger rappelle son chien. Soyez rois sur vos désirs. Si vous avez peur, marchez tranquillement à ce qui vous fait peur. Si vous êtes paresseux, donnez-vous une tâche. Si vous êtes indolent, pliez-vous aux jeux athlétiques. Si vous êtes impatient, donnez-vous des pelotons de ficelle à démêler. Si le ragoût est brûlé, donnez-vous le luxe royal de le manger de bon appétit. Si la tristesse vous prend, décrétez la joie en vous-même. Si l'insomnie vous retourne comme une carpe sur l'herbe, exercez-vous à rester immobile, et à dormir au commandement. Après cela, mes bons amis, puisque vous serez rois en vous, agissez royalement, et faites ce qui vous semblera bon. »
<4 avril 1910>

Hors ligne

#181 2005-12-27 00:46:35

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

François CAVANNA / Lettre ouverte aux culs-bénits / Albin Michel 1994

« Conseils pour la route :
Pars de zéro.
Mets tout à plat.
Rejette toute tradition.
Méprise tout rituel
Ne respecte aucun tabou.
Tiens tout symbole pour ce qu'il est : du vent
Pisse sur le sacré.
N'écoute aucune parole "révélée".
Fuis ceux qui ont la vérité par la foi.
Crache à la gueule des charlatans du "merveilleux".
Ris de tout, pleure de tout, mais selon ton humeur.
Éduque ta raison, tu n'as rien d'autre.
N'admets pour provisoirement acceptable que ce que ta raison estime dûment démontré.
Laisse de côté les questions sans réponse.
Fuis la métaphysique.
Ne te conduis pas en fonction d'une morale transcendante.
Mais que ta morale soit faite des règles nécessaires à la vie de chacun dans une société harmonieuse et fraternelle.
... Sauf, bien sûr, si les hommes noirs prennent le pouvoir et rallument les bûchers. Dans ce cas, mon fils, fais semblant ! »

Hors ligne

#182 2005-12-27 00:47:14

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Philippe BOUVARD / Journal 1992-1996 / Le cherche midi éditeur 1997

« À l'égard de la propriété, de l'amour, de la fortune et du succès, j'applique "la règle des Dudu" : rien n'est dû, rien n'est durable. »

:noel:

Hors ligne

#183 2005-12-27 00:48:06

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

VOLTAIRE / Dictionnaire philosophique / Garnier 1967.

« Toute secte, en quelque genre que ce puisse être, est le ralliement du doute et de l'erreur.
Scotistes, thomistes, réaux, nominaux, papistes, calvinistes, molinistes, jansénistes ne sont que des noms de guerre.
Il n'y a point de secte en géométrie ; on ne dit point un euclidien, un archimédien.
Quand la vérité est évidente, il est impossible qu'il s'élève des partis et des factions. Jamais on n'a disputé s'il fait jour à midi. »

Hors ligne

#184 2005-12-27 00:49:22

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Joseph JOUBERT / Carnets / nrf Gallimard 1938-1994

« Les enfants et les esprits faibles demandent si le conte est vrai. Les esprits sains examinent s'il est moral, s'il est naïf, s'il se fait croire. »
<9 septembre 1799>

« Qu'importe qu'un vieux récit contienne un événement fabuleux ou un événement réel, si la même autorité qui nous l'a fait adopter en l'inculquant dans notre esprit y implique une moralité qui contient des maximes vraies, utiles, nécessaires, indispensables ? »
<31 janvier 1800>

Hors ligne

#185 2005-12-27 00:49:54

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Alfred SAUVY / Mythologie de notre temps / Petite Bibliothèque Payot (191) 1971

« Après la guerre, a été créé le mythe réactionnaire et bêtifiant de la "Belle époque". Les jeunes ont été incités à croire que ce fut un temps de fêtes, autour de la place Pigalle.
Il n'était pas question des 100 000 vagabonds ou mendiants qui traînaient dans Paris, de la mortalité infantile 6 fois plus forte que l'actuelle, de la semaine de 60 heures, sans congés, sans sécurité sociale, non plus que du taudis et de l'expulsion avec saisie des meubles (sauf le lit, par mesure... d'humanité). »

« En matière de records, le chiffre rond paraît une barrière , une sorte de mur du son. "Le mur des 20 mètres sera-t-il franchi un jour, au poids ?", a-t-on dit longtemps, comme si ce nombre présentait une difficulté particulière. Jugement d'autant plus puéril que les Américains, seuls intéressés en ce temps, comptent en pieds. »

Hors ligne

#186 2005-12-27 00:50:26

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

François JACOB / Le jeu des possibles / Fayard 1981

« C'est probablement une exigence de l'esprit humain d'avoir une représentation du monde qui soit unifiée et cohérente. Faute de quoi apparaissent anxiété et schizophrénie. Et il faut bien reconnaître qu'en matière d'unité et de cohérence, l'explication mythique l'emporte de loin sur la scientifique. Car la science ne vise pas d'emblée à une explication complète et définitive de l'univers. Elle n'opère que localement. Elle procède par une expérimentation détaillée sur des phénomènes qu'elle parvient à circonscrire et définir. Elle se contente de réponses partielles et provisoires. Qu'ils soient magiques, mythiques ou religieux, au contraire, les autres systèmes d'explication englobent tout. Ils s'appliquent à tous les domaines. Ils répondent à toutes les questions. Ils rendent compte de l'origine, du présent et même du devenir de l'Univers. On peut refuser le type d'explication offert par les mythes ou la magie. Mais on ne peut leur dénier unité et cohérence car, sans la moindre hésitation, ils répondent à toute question et résolvent toute difficulté par un simple et unique argument a priori. »

Hors ligne

#187 2005-12-27 00:51:11

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

MACHIAVEL / Le Prince / Le livre de poche / Librairie Générale Française 1983

« Je n'ignore pas cette croyance fort répandue : les affaires de ce monde sont gouvernées par la fortune et par Dieu ; les hommes ne peuvent rien y changer, si grande soit leur sagesse ; il n'existe même aucune sorte de remède ; par conséquent il est tout à fait inutile de suer sang et eau à vouloir les corriger, et il vaut mieux s'abandonner au sort. Opinion qui a gagné du poids en notre temps, à cause des grands bouleversements auxquels on assiste chaque jour, et que nul n'aurait jamais pu prévoir. Si bien qu'en y réfléchissant moi-même, il m'arrive parfois de l'accepter. Cependant, comme notre libre arbitre ne peut disparaître, j'en viens à croire que la fortune est maîtresse de la moitié de nos actions, mais qu'elle nous abandonne à peu près l'autre moitié. »

Hors ligne

#188 2005-12-27 00:51:49

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

VOLTAIRE / Dictionnaire philosophique / Garnier 1967.

« Ou le monde subsiste par sa propre nature, par ses lois physiques, ou un Etre suprême l'a formé suivant ses lois suprêmes : dans l'un et l'autre cas, ces lois sont immuables ; dans l'un et l'autre cas, tout est nécessaire ; les corps graves tendent vers le centre de la terre, sans pouvoir tendre à se reposer en l'air. Les poiriers ne peuvent jamais donner d'ananas. L'instinct d'un épagneul ne peut être l'instinct d'une autruche. Tout est arrangé, engendré, limité. »

« Il est contradictoire que ce qui fut hier n'ait pas été, que ce qui est aujourd'hui ne soit pas ; il est aussi contradictoire que ce qui doit être puisse ne pas devoir être.
Si tu pouvais déranger la destinée d'une mouche, il n'y aurait nulle raison qui pût t'empêcher de faire le destin de toutes les autres mouches, de tous les autres animaux, de tous les hommes, de toute la nature ; tu te trouverais au bout du compte plus puissant que Dieu. »

Sur le raisonnement paresseux :
« Il y a des gens qui vous disent : "Ne croyez pas au fatalisme ; car alors tout vous paraissant inévitable, vous ne travaillerez à rien, vous croupirez dans l'indifférence, vous n'aimerez ni les richesses, ni les honneurs, ni les louanges ; vous ne voudrez rien acquérir, vous vous croirez sans mérite comme sans pouvoir ; aucun talent ne sera cultivé, tout périra par l'apathie."
Ne craignez rien, messieurs, nous aurons toujours des passions et des préjugés, puisque c'est notre destinée d'être soumis aux préjugés et aux passions ; nous saurons bien qu'il ne dépend pas plus de nous d'avoir beaucoup de mérite et de grands talents que d'avoir les cheveux bien plantés et la main belle ; nous serons convaincus qu'il ne faut tirer vanité de rien, et cependant nous aurons toujours de la vanité. »

Hors ligne

#189 2005-12-27 00:52:22

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Joseph JOUBERT / Carnets / nrf Gallimard 1938-1994

« Il faut être caillou dans le torrent, garder ses veines et rouler sans être dissous (ni dissolu). »
<25 avril 1812>

Hors ligne

#190 2005-12-27 00:52:54

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Victor HUGO / Faits et croyances / Océan / OEuvres complètes / Robert Laffont - Bouquins 1989

« De certaines destinées ont deux noms. Le premier est comme la préface de l'autre. On est Poquelin avant d'être Molière, Arouet avant d'être Voltaire, et Bonaparte avant d'être Napoléon. Cela tient à ce que ces hommes ont deux aspects, valet de chambre et génie, courtisan et roi, soldat républicain et empereur. »

Hors ligne

#191 2005-12-27 00:53:25

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Friedrich NIETZSCHE / Humain, trop humain. (1878-1879) / OEuvres I / Robert Laffont - Bouquins 1990

« La prétention, ultime consolation. - Si l'on s'arrange pour voir dans un insuccès, dans son insuffisance intellectuelle ou sa maladie le sort auquel on était prédestiné, l'épreuve que l'on doit subir, ou le châtiment mystérieux d'une faute antérieure, on se rend par là son propre être plus intéressant et l'on s'élève par la pensée au-dessus de ses semblables. Le pécheur orgueilleux est une figure connue dans toutes les sectes religieuses. »

« Le fataliste. - Il faut que tu croies à la fatalité - la science peut t'y forcer. Ce qui naîtra alors de cette croyance - la lâcheté et la résignation ou la grandeur et la droiture - témoignera du terrain où cette semence fut jetée ; mais non point de la semence elle-même, car d'elle toutes choses peuvent sortir. »

Hors ligne

#192 2005-12-27 00:53:57

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Jerome K. JEROME / Arrière-pensées d'un paresseux (1898) / Arléa 1998

« Dans ma jeunesse, la question qui me préoccupait au premier chef était la suivante : "Quel genre d'homme vais-je décider d'être ?" À dix-neuf ans, c'est une question que l'on se pose. À trente-neuf, on dit : "Si seulement le destin n'avait pas fait de moi l'homme que je suis." »

Hors ligne

#193 2005-12-27 00:54:27

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Ambrose BIERCE / Le Dictionnaire du Diable (1911) / Éditions Rivages 1989

« Destinée n. Justification du Tyran pour ses crimes, excuse de l'imbécile pour ses échecs. »

Hors ligne

#194 2005-12-27 00:54:57

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Léon DAUDET / Le stupide XIXe siècle (1922) / Souvenirs et polémiques / Robert Laffont - Bouquins 1992

« Ce qu'on appelle la destinée physiologique n'est souvent qu'une mauvaise hygiène. Ce qu'on appelle la destinée psychologique n'est souvent qu'une mauvaise éducation. Ce qu'on appelle la fatalité n'est le plus souvent qu'incurie politique et légèreté. S'il est une leçon que l'âge apporte à celui qui lit et réfléchit, c'est que les possibilités de l'homme, dans le bien, sont infinies ; alors que ses possibilités dans le vice et dans le mal sont assez courtes ; c'est que sa responsabilité est entière et reste entière. »

Hors ligne

#195 2005-12-27 00:55:30

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

ALAIN / 81 chapitres sur l'esprit et les passions / Les Passions et la Sagesse / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1960

« Le fatalisme est une disposition à croire que tout ce qui arrivera dans le monde est écrit ou prédit, de façon que, quand nous le saurions, nos efforts ne feraient pas manquer la prédiction, mais au contraire, par détour imprévu, la réaliseraient. Cette doctrine est souvent présentée théologiquement, l'avenir ne pouvant pas être caché à un Dieu très clairvoyant ; il est vrai que cette belle conclusion enchaîne Dieu aussitôt ; sa puissance réclame contre la prévoyance. Mais nous avons jugé ces jeux de paroles. Bien loin qu'ils fondent jamais quelque croyance, ils ne sont supportés que parce qu'ils mettent en argument d'apparence ce qui est déjà l'objet d'une croyance ferme, et mieux fondée que sur des mots. Le fatalisme ne dérive pas de la théologie ; je dirais plutôt qu'il la fonde. Selon le naïf polythéisme, le destin est au-dessus des dieux. »

« Ces temps de destruction mécanique ont offert des exemples tragiques de cette détermination par les causes sur lesquels des millions d'hommes ont réfléchi inévitablement. Un peu moins de poudre dans la charge, l'obus allait moins loin, j'étais mort. L'accident le plus ordinaire donne lieu a des remarques du même genre ; si ce passant avait trébuché, cette ardoise ne l'aurait point tué. Ainsi se forme l'idée déterministe populaire, moins rigoureuse que la scientifique, mais tout aussi raisonnable. Seulement l'idée fataliste s'y mêle, on voit bien pourquoi, à cause des actions et des passions qui sont toujours mêlées aux événements que l'on remarque. On conclut que cet homme devait mourir là, et que c'était sa destinée, ramenant ainsi en scène cette opinion de sauvage que les précautions ne servent à rien contre le dieu, ni contre le mauvais sort. Cette confusion est cause que les hommes peu instruits acceptent volontiers l'idée déterministe ; elle répond au fatalisme, superstition bien forte et bien naturelle comme on l'a vu. »

Hors ligne

#196 2005-12-27 00:56:12

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

ALAIN / Propos I / Bibliothèque de la Pléiade / nrf Gallimard 1956

« Je vois des gens, qui, avec assez de moyens, ne sont arrivés qu'à une maigre et petite place. Mais que voulaient-ils ? Leur franc parler ? Ils l'ont. Ne point flatter ? Ils n'ont point flatté et ne flattent point. Pouvoir par le jugement, par le conseil, par le refus ? Ils peuvent. Il n'a point d'argent ? Mais n'a-t-il pas toujours méprisé l'argent ? L'argent va à ceux qui l'honorent. Trouvez-moi seulement un homme qui ait voulu s'enrichir et qui ne l'ait point pu. Je dis qui ait voulu. Espérer ce n'est pas vouloir. Le poète espère cent mille francs ; il ne sait de qui ni comment ; il ne fait pas le moindre petit mouvement vers ces cent mille francs ; aussi ne les a-t-il point. Mais il veut faire de beaux vers. Aussi les fait-il. Beaux selon sa nature, comme le crocodile fait ses écailles et l'oiseau ses plumes. On peut appeler aussi destinée cette puissance intérieure qui finit par trouver passage ; mais il n'y a de commun que le nom entre cette vie si bien armée et composée, et cette tuile de hasard qui tua Pyrrhus. Ce que m'exprimait un sage, disant que la prédestination de Calvin ne ressemblait pas mal à la liberté elle-même. »
<3 octobre 1923>

Hors ligne

#197 2005-12-27 00:56:50

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Sacha GUITRY / Pensées / Cinquante ans d'occupations / Omnibus Presses de la Cité 1993

« Je n'ai pas présente à l'esprit la définition du Fataliste par Tolstoï - j'ignore même si cette question existe dans son oeuvre, mais elle en émane du moins, et je croirais volontiers que, être fataliste, ce n'est pas tellement croire en Dieu. C'est bien plutôt, je pense, une sorte de lassitude, une forme du dilettantisme et un manque presque total de volonté. C'est une espèce de renoncement que l'on veut croire momentané et, tandis que la confiance en soi somnole, c'est une résignation passive et presque souriante en présence d'une volonté supérieure - que l'on suppose bienfaisante, que les uns appellent la volonté du Destin, d'autres la volonté de Dieu, et qui n'est, somme toute, en général que la volonté des autres. »

Hors ligne

#198 2005-12-27 00:57:32

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Jean COCTEAU / Le Rappel à l'ordre / Romans, Poésies, OEuvres diverses / La Pochothèque LdP 1995

« Que pense la toile sur laquelle on est en train de peindre un chef-d'oeuvre ? "On me salit. On me brutalise. On me cache." Ainsi l'homme boude son beau destin. »

Hors ligne

#199 2005-12-27 00:58:04

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Jean COCTEAU / La difficulté d'être / Romans, Poésies, OEuvres diverses / La Pochothèque LdP 1995

« De tous les problèmes qui nous embrouillent, celui du destin et du libre arbitre est le plus obscur. Quoi ? la chose est écrite à l'avance et nous pouvons l'écrire, nous pouvons en changer la fin ? La vérité est différente. Le temps n'est pas. Il est notre pliure. Ce que nous croyons exécuter à la suite, s'exécute d'un bloc. Le temps nous le dévide. Notre oeuvre est déjà faite. Il ne nous reste pas moins à la découvrir. C'est cette participation passive qui étonne. Et il y a de quoi. Elle laisse le public incrédule. Je décide et je ne décide pas. J'obéis et je dirige. C'est un grand mystère. »

Hors ligne

#200 2005-12-27 00:58:39

COMPTABALOU
Membre
Inscription : 2004-06-09
Messages : 5 048

Re : CITATIONS BEAUCOUP BEAUCOUP MOINS DEBILES

Robert MUSIL / L'homme sans qualités / Editions du Seuil - Points 1956

« Alors, Ulrich se souhaita d'être un homme sans qualités. Mais les choses ne sont pas tellement différentes chez les autres hommes. Au fond, il en est peu qui sachent encore, dans le milieu de leur vie, comment ils ont bien pu en arriver à ce qu'ils sont, à leurs distractions, leur conception du monde, leur femme, leur caractère, leur profession et leurs succès ; mais ils ont le sentiment de n'y plus pouvoir changer grand-chose. On pourrait même prétendre qu'ils ont été trompés, car on n'arrive jamais à trouver une raison suffisante pour que les choses aient tourné comme elles l'ont fait ; elles auraient aussi bien pu tourner autrement ; les événements n'ont été que rarement l'émanation des hommes, la plupart du temps ils ont dépendu de toutes sortes de circonstances, de l'humeur, de la vie et de la mort d'autres hommes, ils leur sont simplement tombés dessus à un moment donné. Dans leur jeunesse, la vie était encore devant eux comme un matin inépuisable, de toutes parts débordante de possibilités et de vide, et à midi déjà voici quelque chose devant vous qui est en droit d'être désormais votre vie, et c'est aussi surprenant que le jour où un homme est assis là tout à coup, avec qui l'on a correspondu pendant vingt ans sans le connaître, et qu'on s'était figuré tout différent. Mais le plus étrange est encore que la plupart des hommes ne s'en aperçoivent pas ; ils adoptent l'homme qui est venu à eux, dont la vie s'est acclimatée en eux, les événements de sa vie leur semblent désormais l'expression de leurs qualités, son destin est leur mérite ou leur malchance. Il leur est arrivé ce qui arrive aux mouches avec le papier tue-mouches : quelque chose s'est accroché à eux, ici agrippant un poil, là entravant leurs mouvements, quelque chose les a lentement emmaillotés jusqu'à ce qu'ils soient ensevelis dans une housse épaisse qui ne correspond plus que de très loin à leur forme primitive. Dès lors, ils ne pensent plus qu'obscurément à cette jeunesse où il y avait eu en eux une force de résistance : cette autre force qui tiraille et siffle, qui ne veut pas rester en place et déclenche une tempête de tentatives d'évasion sans but ; l'esprit moqueur de la jeunesse, son refus de l'ordre établi, sa disponibilité à toute espèce d'héroïsme, au sacrifice comme au crime, son ardente gravité et son inconstance, tout cela n'est que tentatives d'évasion. »

Hors ligne

Pied de page des forums